Présentation
 
Il y a 30 ans, le 25 mai 1993, la Cour européenne des droits de l’homme rendait enfin son premier arrêt sur le fondement de l’article 9 de la Convention européenne garantissant la liberté de pensée, de conscience et de religion. Il n’est pas anodin de rappeler que cet arrêt concernait la « prédication » des Témoins de Jéhovah, groupement considéré en France comme une « secte » selon le rapport parlementaire Gest-Guyard de 1995. L’arrêt Kokkinakis consacre la liberté de convaincre son prochain au moyen d’un enseignement, c’est-à-dire le prosélytisme, comme élément central de la liberté de manifester sa religion, sans quoi, comme le souligne la Cour, « le droit de changer de religion risquerait de rester lettre morte ». Mais il est aussi la pierre de fondement, à partir d’une définition magistrale de la liberté de religion, du développement d’une jurisprudence abondante de la Cour européenne qui permet aujourd’hui d’affirmer qu’il existe une liberté européenne de religion imposant des obligations tant négatives que positives aux États parties à la Convention. Tous les aspects de cette liberté complexe ont ainsi été éclairés par cette jurisprudence, qu’il s’agisse de la dimension individuelle ou collective de la liberté de religion, de ses diverses manifestations en public ou en privé. Tous les groupements religieux minoritaires ont pu bénéficier d’une interprétation dynamique et protectrice, ce qui devrait satisfaire toutes les obédiences puisqu’on est toujours la minorité de quelqu’un quelque part. L’Église de scientologie, les Témoins de Jéhovah, les mormons ou les évangélistes côtoient dans l’hémicycle strasbourgeois les musulmans, les catholiques, les protestants, des agnostiques et des athées. Tous espèrent que le juge européen entendra leurs prières et leurs lamentations. C’est souvent le cas. Mais pas toujours car la liberté de religion n’a rien d’absolu. Quoi de plus normal que de célébrer cet anniversaire à Strasbourg, siège de la Cour européenne, et de le faire dans le cadre des Rencontre droits et religions qu’organise l’équipe droits et religions du laboratoire Droit, religion, entreprise et société de l’Université de Strasbourg, laboratoire qui a fait beaucoup pour la promotion d’un droit (laïque) des religions comme en témoigne la Revue du droit des religions créée en 2015 en son sein. L’arrêt Kokkinakis fait partie des grands arrêts de la Cour européenne, ses développements sont considérables et interrogent sur la place réservée à la religion dans nos sociétés contemporaines. L’occasion rêvée pour quelques spécialistes universitaires et acteurs de cette société de s’interroger sur la pertinence des apports de la Cour européenne à ce débat d’idées, d’idéaux et de valeurs souvent posé sur un mode plus conflictuel que consensuel
 
Programme
 
Jeudi 5 Octobre
 
14h00 : Accueil des participants
14h30 : Ouverture du colloque
 Michel Deneken
14h45 : Intro
 Gérard Gonzalez et Mélanie Schmitt
 
Partie 1 - Kokkinakis comme pierre de fondement de la liberté de religion
Présidence : Mathias Guyomar, juge à la Cour EDH
15h00 : Inside Kokkinakis
 Panos Bitsaxis, avocat au barreau d’Athènes, conseil dans l’affaire Kokkinakis
15h30 : La définition de la liberté de religion au sens de la Convention EDH (le paragraphe 31 de l’arrêt)
 Sébastien Van Drooghenbroeck, Professeur université de Saint-Louis
16h00 : Discussion
16h30 : Pause
16h45 : La promotion du droit de changer de religion et ses conséquences
 Aurélia Schahmaneche, Professeure université Lyon 2
17h15 : La distinction entre « prosélytisme de bon aloi » et prosélytisme abusif au sens de la Convention EDH
 Christos Giannopoulos, MCF Strasbourg
17h45 : Discussion
18h15 : Fin de la demi-journée
 
Vendredi 6 Octobre
 
9h00 : Accueil des participants
 
Partie 2 - Croissance et consolidation de la liberté européenne de religion dans la jurisprudence de la Cour EDH
Présidence : Vincente Fortier, Directrice de recherche CNRS, DRES
9h15 : La marge nationale d’appréciation et le principe de subsidiarité comme freins au développement de la liberté européenne de religion
 María-José Valero-Estarellas, Professeure Villanueva University - Madrid
9h45 : De l’usage raisonnée du label « secte » selon la Cour EDH
 Gérard Gonzalez, Professeur émérite Université de Montpellier
10h15 : Discussion
10h45 : Pause
11h00 : De la liberté individuelle à la liberté collective de religion – le droit européen des cultes
 Peggy Ducoulombier, Professeure à l’Université de Strasbourg
11h30 : Les lieux de culte dans la jurisprudence de la Cour EDH
 Anne Fornerod, Directrice de recherche CNRS, DRES
12h00 : Discussion
 
12h30 : Pause médiane
 
14h00 : Accueil des participants
 
Partie 3 - La liberté européenne des religions : Influences et résistances
Présidence : Frédéric Krenc, juge à la Cour EDH
14h15 : L’islam est-il soluble dans la liberté européenne de religion
 Lauren Bakir, Ingénieure de recherche CNRS, DRES
14h45 : L’interprétation de la Charte des droits fondamentaux de l’UE
 Françoise Curtit, Ingénieure de recherche CNRS, DRES
15h15 : Pause
15H30 : L’universalisme des droits de l’homme malade de la liberté de religion ?
 Mustapha Afroukh, MCF université Montpellier
16h00 : Discussion
16h30 : Conclusions
 Laurence Burgorgue-Larsen, Professeure université Paris 1 Panthéon Sorbonne
17h00 : Clôture
 
 
Contact : l.bakir@unistra.fr
Colloque organisé par l'UMR 7354 DRES, UNISTRA dans le cadre des "7èmes Rencontres Droit et Religion"