Droit commercial – Procédures collectives. Le législateur a encore compliqué, sans doute inutilement, le droit des procédures collectives (Ord. n° 2014-326 du 12 mars 2014. – D. n° 2014-736 du 30 juin 2014 – Ord. n° 2014-1088 du 26 septembre 2014 complétant l’ordonnance n° 2014-326 du 12 mars 2014), par Hervé CROZE, Professeur des Universités

::/introtext::
::fulltext::L’essentiel de la réforme des procédures collectives DROIT COMMERCIAL - PROCÉDURES COLLECTIVES

Par Hervé CROZE

Professeur des Universités, Avocat au Barreau de Lyon, Requet Chabanel

 

 

Ord. n° 2014-326 du 12 mars 2014 portant réforme de la prévention des difficultés des entreprises et des procédures collectives – D. n° 2014-736 du 30 juin 2014 – Ord. n° 2014-1088 du 26 septembre 2014 complétant l’ordonnance n° 2014-326 du 12 mars 2014.


Le législateur a encore compliqué, sans doute inutilement, le droit des procédures collectives par les textes précités (dont les principaux sont entrés en vigueur depuis le 1er juillet 2014).
Le tableau ci-après rappelle les grandes lignes des procédures applicables en cas de difficultés des entreprises (Livre VI du Code de commerce).


Rappelons que ces procédures s’appliquent à toute personne morale de droit privé et, s’agissant des personnes physiques, aux commerçants, artisans, agriculteurs et membres des professions libérales, bref à tout travailleur indépendant…

On ne retiendra de ces réformes, complexes et volumineuses, que ce qui est essentiel et nouveau, soit :

  • · La consécration de ce que la pratique appelle le pré-pack (I) ;
  • · La généralisation de la procédure de sauvegarde accélérée (II) ;
  • La création d’une nouvelle procédure de rétablissement professionnel (III).
  • I - Le pré-pack

    Il s’agit d’une possibilité ajoutée à la procédure de conciliation.

    Il est désormais prévu à l’article L. 611-7 du Code de commerce que le conciliateur « peut être chargé, à la demande du débiteur et après avis des créanciers participants, d’une mission ayant pour objet l’organisation d’une cession partielle ou totale de l’entreprise qui pourrait être mise en œuvre, le cas échéant, dans le cadre d’une procédure ultérieure de sauvegarde, de redressement judiciaire ou de liquidation judiciaire ».

    Cela permettra en pratique de parvenir plus rapidement à un plan de cession de l’entreprise.

    II – La sauvegarde accélérée

    La loi n° 2010-1249 du 22 octobre 2010 de régulation bancaire et financière avait créé une nouvelle procédure : la sauvegarde financière accélérée.

    L’Ordonnance n° 2014-326 du 12 mars 2014 généralise la procédure de sauvegarde accélérée dont la sauvegarde financière accélérée n’est plus qu’une espèce. Cette procédure ne s’applique que dans des cas précis.

    Ainsi, elle est réservée aux débiteurs :

  • soit dont les comptes ont été certifiés par un commissaire aux comptes ou établis par un expert-comptable et dont le nombre de salariés est supérieur à 20, ou le chiffre d'affaires hors taxe supérieur à 3 000 000 €, ou le total de bilan supérieur à 1 500 000 € ;
  • soit qui ont établi des comptes consolidés.
  • Il s’agit d’une procédure de sauvegarde dont on appliquera en principe les règles.

    Cependant il est remarquable que « la circonstance que le débiteur soit en cessation des paiements ne fait pas obstacle à l'ouverture de la procédure de sauvegarde accélérée si cette situation ne précède pas depuis plus de quarante-cinq jours la date de la demande d'ouverture de la procédure de conciliation » (C. com., art. L. 628-1).

    III - Le rétablissement professionnel

    La procédure de rétablissement professionnel (qu’il ne faut pas confondre avec le rétablissement personnel en matière de surendettement qui est réglé par le Code de la consommation) n’est ouverte qu’aux conditions suivantes :

    • le débiteur est une personne physique qui exerce une activité professionnelle indépendante (commerçant, artisan, agriculteur, profession libérale) qui n’a pas eu recours à la technique de l’EIRL (en fait il y en a très peu) ;
    • son actif est inférieur à 5 000 euros (ce qui va éliminer pas mal de monde) ;
    • il n’a employé aucun salarié au cours des six derniers mois (et il ne fait l’objet d’aucune instance prud’homale en cours – en tant qu’employeur peut-on supposer …) ;

    · il ne fait l’objet d’aucune procédure collective en cours ;

    · il n’a pas bénéficié, depuis moins de cinq ans, d’un rétablissement professionnel ni d’une clôture de liquidation judiciaire pour insuffisance d’actif.

    La demande de rétablissement professionnel est faite dans l’acte par lequel le débiteur demande la liquidation judiciaire.

    Le tribunal désigne un juge commis (ne pas confondre avec le juge-commissaire) et un mandataire judiciaire (il n’y a pas d’administrateur évidemment).

    La durée de la procédure est de quatre mois.

    La clôture de la procédure de rétablissement professionnel entraine en principe l’effacement des dettes à l’égard des créanciers antérieurs au jugement d’ouverture (C. com., art. L. 645-11).

    Cette notion d’effacement des dettes – qui est une curiosité juridique – rappelle celle que l’on trouve dans le rétablissement personnel dont peuvent bénéficier les personnes surendettées (C. consomm., art. L. 332-9).

     Le débiteur doit :

    • être engagé dans une procédure de conciliation ;
    • avoir élaboré un projet de plan dont l’adoption rapide est vraisemblable.

    On remarquera le lien avec la procédure de conciliation qui est à rapprocher de la création du pré-pack dans cette dernière procédure.

    Le plan doit être arrêté dans un délai de trois mois sinon le tribunal met fin à la procédure sans que l’on sache exactement ce qui se passera après…

    Si « les comptes du débiteur font apparaître que la nature de l’endettement rend vraisemblable l’adoption d’un plan par les seuls créanciers ayant la qualité de membres de comité des établissements de crédit et, s’il y a lieu, (les créanciers obligataires), le débiteur peut, …demander l’ouverture d’une procédure de sauvegarde financière accélérée. Celle-ci n’aura d’effet qu’à l’égard de ces créanciers . »

    Faculté de Droit