Droit commercial . Dans la continuité de la loi n° 2014-1 du 2 janvier 2014 habilitant le Gouvernement à simplifier et sécuriser la vie des entreprises et à l’instar du droit des entreprises en difficulté ou du droit commercial, le droit des sociétés a fait l’objet d’une réforme au travers de l’ordonnance n° 2014-863 du 31 juillet 2014, par Aurélien ROCHER, Consultant fiscal, diplômé du CAPA, PwC.

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Le droit des sociétés après l’ordonnance n° 2014-863 du 31 juillet 2014 DROIT DES SOCIETES

Par Aurélien ROCHER

Consultant fiscal diplômé du CAPA, PwC

 

La loi n° 2014-1 du 2 janvier 2014 habilitant le Gouvernement à simplifier et sécuriser la vie des entreprises a autorisé le Gouvernement à prendre par ordonnance des mesures relevant du domaine de la loi.

Parmi les dispositions d'habilitation prévues par cette loi, figuraient notamment des mesures prévoyant l'allégement des obligations d'établissement et de publication des comptes des micro-entreprises, la possibilité de permettre à une EURL de devenir associée d'une autre EURL ou encore la simplification des formalités relatives à la cession des parts de SNC et de SARL. Une réforme des procédures collectives était également programmée.

Point de droit

Le Gouvernement peut demander au Parlement l’autorisation - par le vote d’une loi d’habilitation - de prendre des mesures relevant du domaine de la loi afin de mettre en œuvre son programme (art. 38 de la Constitution).

Sans lien avec la loi d’habilitation précitée, il importe également de mentionner la loi relative à l’artisanat, au commerce et aux très petites entreprises, dite « Loi Pinel » du 18 juin 2014 (L. 2014-626, 18 juin 2014, JO 18 juin 2014, commentée p. 9) laquelle a apporté d’importantes modifications au droit commercial, tout particulièrement s’agissant des règles régissant le bail commercial.

L’ordonnance n° 2014-863 du 31 juillet 2014 apporte des modifications tenant, d’une part, à des clarifications concernant le régime juridique de certains titres financiers (actions de préférence et valeurs mobilières donnant accès au capital ou donnant droit à l'attribution de titres de créance, titres obligataires) et, d’autre part, à la simplification de certaines règles de fonctionnement des sociétés commerciales.

I – La réforme des titres financiers

La possibilité offerte aux émetteurs de titres de capital ou de titres donnant accès au capital d’identifier leurs porteurs est désormais étendue aux émetteurs d’obligations.

Cette nouveauté est essentielle, en ce qu’elle permet d’identifier les détenteurs de titres obligataires, sauf à ce que le contrat d’émission y fasse exception, et d’assurer de la sorte une gestion de la dette plus efficiente.

Au surplus, et suivant les règles d’identification des actionnaires non-résidents, les intermédiaires teneurs de comptes-titres sont désormais tenus aux mêmes règles déclaratives, s’agissant des détenteurs d’obligations nominatives.

Dans l’optique de dynamiser le recours des praticiens aux actions de préférence, des précisions sont apportées quant au régime du rachat desdites actions.

Il est ainsi prévu que seule la société émettrice peut initier le rachat de ces titres sociaux et leur affectation par cette dernière est également précisée par renvoi aux règles de droit commun en la matière (pour l’essentiel renvoi aux règles de l’autodétention d’actions et de la réduction de capital).

Autre nouveauté essentielle, la compétence de l’assemblée générale extraordinaire, s’agissant de l’émission de valeurs mobilières complexes (obligations échangeables en actions (OEA), remboursables en actions (ORA) etc), est désormais recentrée sur les seuls titres ayant un effet dilutif, soit les titres de capital donnant accès à d’autres titres de capital et les valeurs mobilières donnant accès à des titres de capital à émettre.

Enfin, divers aménagements sont apportés au droit français s’agissant du traitement des opérations sur titres, lesquelles font actuellement l’objet d’une harmonisation au niveau de l’Union européenne.

Différentes mesures, d’application progressive, sont ainsi engagées et tiennent notamment à une distinction plus marquée entre les périodes de souscription d’actions nouvellement émises et de négociation des droits préférentiels de souscription dans le cadre d’une augmentation de capital avec droit préférentiel de souscription.

II – La réforme des sociétés commerciales

Les formalités relatives à la cession de parts sociales de SNC ou de SARL sont également clarifiées, le seul dépôt au RCS (registre du commerce et des sociétés) des statuts modifiés en conséquence de ladite cession étant désormais suffisant pour l’opposabilité aux tiers.

Antérieurement, il était également nécessaire de déposer l’acte de cession lui-même au RCS.

Une SARL à associé unique peut désormais être l’associée d’une autre SARL à associé unique, étant entendu que cette possibilité était déjà existante pour les SASU.

D’importantes nouveautés sont également à signaler s’agissant des conventions réglementées :

- Exclusion des conventions conclues avec une filiale détenue à 100 % ;

- Obligation de motivation des autorisations données par le conseil d'administration ou le conseil de surveillance s’agissant des conventions re réglementées.

- Réexamen annuel des conventions conclues et autorisées au cours d'exercices antérieurs.

- Intégration dans le champ des conventions réglementées des conventions conclues par une filiale, détenue directement ou indirectement, et concernant directement ou indirectement un dirigeant et/ou un administrateur de la société, ou un actionnaire détenant plus de 10 % du capital de la société.

Enfin, l’articulation des clauses statutaires ou conclues entre les associés et l’article 1843-4 du Code civil prévoyant l’intervention d’un expert en charge de l’évaluation des titres sociaux en cas de cession est affinée.

La jurisprudence avait longtemps été indécise quant à l’étendue des pouvoirs de ce dernier jusqu’à un arrêt récent (Cass. com., 11 mars 2014, n° 11-26.915) qui considérait que les règles de valorisation des titres prévues par les associés prévalent sur toute autre méthode de l’expert.

Ainsi, l’article 1843-4 du Code civil est modifié et prévoit que l’expert désigné est tenu d’appliquer les méthodes de valorisation retenues par les parties, dans les statuts ou dans une convention extrastatutaire.

L’ensemble des changements législatifs introduits par cette ordonnance tendent donc à assurer une sécurité juridique plus marquée et à permettre davantage de souplesse et d’efficacité dans l’application des règles de fonctionnement des sociétés commerciales.

Point de droit

Ne pas confondre :

- EURL, ou entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée, qui correspond à une SARL à associé unique (i.e., une société) ;

- EIRL, ou entrepreneur individuel à responsabilité limitée (i.e., organisation patrimoniale permettant de constituer un patrimoine distinct du patrimoine privé et affecté à une activité professionnelle).

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